O. Héaulme (directeur Aléa Contrôles) : « Notre-Dame est pour le plomb ce que Jussieu a été pour l’amiante »

En raison de son intérêt physico-chimique, le plomb a été très utilisé dans le bâtiment durant des siècles. L’incendie de Notre-Dame a mis en évidence la présence des risques liés à ce matériau extrêmement nocif s’il pénètre dans l’organisme. Il a sans doute éveillé, notamment auprès des pouvoirs publics, le besoin de vigilance et de prévention, comme l’avait fait à l’époque le désamiantage de la Tour de Jussieu.

Le 18 septembre 2019

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O. Héaulme (directeur Aléa Contrôles) : « Notre-Dame est pour le plomb ce que Jussieu a été pour l’amiante »  

En raison de son intérêt physico-chimique, le plomb a été très utilisé dans le bâtiment durant des siècles. L’incendie de Notre-Dame a mis en évidence la présence des risques liés à ce matériau extrêmement nocif s’il pénètre dans l’organisme. Il a sans doute éveillé, notamment auprès des pouvoirs publics, le besoin de vigilance et de prévention, comme l’avait fait à l’époque le désamiantage de la Tour de Jussieu.

Quels sont les dangers majeurs liés au plomb, en particulier dans le cas d’un incendie de grande ampleur au sein d’un bâtiment ?

Durant des siècles, le plomb a présenté un intérêt physico-chimique évident dans le bâtiment. Par sa présence dans la peinture, il accélère son séchage et maintient plus longtemps les couleurs originelles. C’est pourquoi il a été utilisé pour élaborer des vitraux et par des artistes comme Van Gogh. Il est aussi étanche, résistant, peu coûteux et facilement malléable pour adopter la forme d’une structure, d’où son usage pour fabriquer des gouttières par exemple.

Il est aujourd’hui établi que le plomb a de puissants effets toxiques, même ingéré à faible dose. Il provoque des maladies potentiellement mortelles, en pénétrant dans l’organisme par les voies digestive ou respiratoire, par les muqueuses et par voie transplacentaire chez la femme enceinte. Chaque année, on recense en France plusieurs centaines de cas de saturnisme chez les enfants, qui peuvent engendrer de graves conséquences irréversibles, notamment sur le développement cognitif et psychomoteur. L’exposition au plomb peut aussi dégénérer en cancer du sang, comme c’est le cas pour des travailleurs du bâtiment.

Une fois passé dans le sang, le plomb est en effet capturé par les os et relâché durant des années, comme un poison lent et mortel qui circule dans le corps durant des années.

Dans le cas de l’incendie de Notre-Dame, le feu a volatilisé les matériaux, et en particulier le plomb, plus lourd de l’air, qui a fini par retomber au sol, sur plusieurs centaines de mètres de l’édifice.

Quelles sont les règles de sécurité à respecter en cas d’incendie d’un bâtiment ancien ?

Les premiers secours, en l’occurrence les pompiers, doivent être informés de la présence potentielle de plomb ou de tout autre matériau nocif dans le bâtiment sinistré, et protégés en conséquence des risques recensés.

En plus de cette obligation, tous les intervenants après le sinistre, tels que les travailleurs qui déblaieront le site, ou encore les artisans chargés de reconstruire Notre-Dame, sont tenus de suivre une formation spécifique pour opérer, puisqu’il s’agit d’un site pollué. Ils connaîtront ainsi des règles d’hygiène de bon sens, comme par exemple concernant la pollution au plomb : ne pas ramasser des objets au sol sauf nécessité, port d’un masque adapté en cas de poussières remuées, retirer ses gants « délicatement »…

Pour tous les bâtiments de France, en particulier ceux construits avant 1949 pour le plomb et avant 1997 pour l’amiante, la numérisation BIM permettrait, entre autres, d’embarquer cette information de présence de matériaux nocifs et de la délivrer à tout moment, à travers des logiciels à lecture gratuite.

Au sein des écoles comme sur certains lieux publics, à proximité de Notre Dame, on a procédé à une décontamination justifiée des lieux. Les enfants qui s’assoient au sol sont susceptibles de mettre leurs mains en contact avec des sols pollués et de les porter ensuite à la bouche.

Dans les mois suivant l’incendie, il faut continuer de faire procéder à des mesures à fréquence régulière par des tiers qualifiés et compétents : tests de lingettes et mesures d’empoussièrement.

Avec la stratégie d’échantillonnage élaborée par Aléa Contrôles selon les travaux réalisés, on peut optimiser le temps de travail et donc limiter les coûts de cette surveillance.

Quelle est la situation aujourd’hui autour de Notre-Dame ?

En juillet dernier, l’Agence Régionale de Santé (ARS) d'Île-de-France a publié un avis sanitaire relatif à la pollution au plomb à la suite de l'incendie de la Cathédrale Notre-Dame de Paris. Elle propose, à travers ce document et en lien avec le Ministère de la Santé, une valeur environnementale associée à des préconisations sanitaires.

A une concentration supérieure à 5 000 µg/m² pour le plomb, cet organisme de référence considère que le « bruit de fond parisien » est dépassé. C’est-à-dire, qu’au-dessus de ce taux, la présence de plomb a été générée par un événement extérieur, tels qu’un incendie ou tout simplement des travaux.

Cette valeur est une première, sans pour autant constituer « une référence sanitaire quant à un risque qui serait encouru par la population évoluant dans des espaces où des prélèvements supérieurs seraient constatés », précise l’avis sanitaire de l’ARS. Cela dépend en effet du type d’usage des espaces. Par exemple, pour le Constat de risque d'exposition au plomb (CREP) réalisé dans un lieu d’habitation, le seuil considéré comme dangereux pour la santé est de 1 000 µg/m².

En fait, Notre-Dame, dont l’incendie éminemment symbolique a été suivi en direct par des millions de personnes, est pour le plomb ce que Jussieu a été pour l’amiante : une prise de conscience du risque Plomb par les pouvoirs publics, les institutionnels et les travailleurs sur place. Cette problématique du plomb peut se reproduire ailleurs, du fait des constructions dans notre pays.

 

 

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